Haute horlogerie, montres de haut de gamme, précieuse, de luxe… Ne nous leurrons pas, aucun de ces termes ne répond à une définition rigoureuse susceptible d’informer, voire rassurer le client. Heureusement certaines maisons horlogères font appel à des normes de qualité plus explicites. Tour d’horizon.
Le Poinçon de Genève et son certificat.
Dès la fin du 19ème siècle, le nec plus ultra de l’horlogerie a cherché à se protéger contre l’arrivée en masse sur le marché de montres de faible qualité.C’est ainsi qu’à peu d’années d’intervalle, et dans plusieurs villes européennes, des initiatives furent prises pour protéger et promouvoir le travail des meilleurs horlogers locaux. Le plus ancien standard d’excellence est le Poinçon de Genève. Instauré par la République et Canton de Genève en 1886, il fut et reste tout à la fois une garantie de provenance, et du respect de règles ancestrales touchant au soin apporté à la finition et à la décoration de chaque composant du mouvement. Cependant, la commission technique du Poinçon de Genève a du élargir le domaine d’application de ses critères, suite à la défection de Patek Philippe qui décida en 2009 d’établir son propre poinçon sur des bases plus exhaustives.
Calibre Roger Dubuis frappé du Poinçon de Genève |
Refondé en 2012, le Poinçon de Genève conserve aujourd’hui l’essentiel de ses critères historiques portant sur le mouvement, mais y a ajouté de nouvelles exigences concernant la montre finie : chronométrie, étanchéité, réserve de marche, et fiabilité de ses fonctions additionnelles. Parmi les rares maisons horlogères dont des montres arborent aujourd’hui le Poinçon de Genève, on citera entre autres Vacheron Constantin, Cartier, Chopard (L.U.C), et bien entendu Roger Dubois qui certifie ainsi la totalité de sa production.
La guerre des poinçons
Calibre Patek Philippe portant le poinçon de la manufacture.
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Aujourd’hui, une ancienne certification créée par une institution horlogère renommée pointe à nouveau le nez. C’est le Poinçon Vipère, instauré en 1897 par l’Observatoire de Besançon afin de certifier les chronomètres fabriqués dans une région qui était alors le principal foyer de l’horlogerie française. Après avoir abandonné son activité de contrôle chronométrique dans les années 1970, l’Observatoire de Besançon les a maintenant relancées à la demande de plusieurs fabricants européens. Avec le Contrôle Officiel Suisse des Chronomètres (COSC) et le très confidentiel Centre Wempe Glashütte, en Allemagne, il est le seul organisme au monde habilité à décerner à une montre le titre officiel de « chronomètre » au terme de 16 jours de test intensifs. Contrairement au COSC qui ne contrôle que les mouvements, cette certification porte sur des montres terminées, telles qu’elles seront commercialisées. Ironie de l’histoire, parmi les plus récentes nouveautés horlogères arborant le Poinçon Vipère figurent deux montres fabriquées par de prestigieuses marques suisses TAG Heuer et Zenith.
Le COSC, arbitre suisse de la chronométrie
Derrière l’acronyme COSC se cache une ASBL reconnue d’utilité publique œuvrant au service de l’horlogerie helvétique: depuis 1972 : le Contrôle Officiel Suisse des Chonomètres. Seul habilité en Suisse attribuer officiellement la qualité de chronomètre à un mouvement, le COSC a établi un programme d’épreuves spécifiques d’une durée variable selon le type de garde-temps auquel il est destiné – 15 jours pour ceux des montres-bracelets mécanique. Chaque mouvement est soumis à un contrôle individuel portant sur 7 critères. Le résultat le plus souvent évoqué par les horlogers qui soumettent leurs mouvements au COSC correspond à une marche diurne moyenne sur les 10 premiers jours de contrôle qui doit être comprise entre - 4 secondes et + 6 secondes par jour. Gage de haute précision, le titre de « chronomètre » est aussi un argument de vente pour les marques, de plus en plus nombreuses à vouloir s’y référer. Depuis la création du COSC le nombre de ses certifications n’a cessé d’augmenter – de 200000 en 1972, à environ 1,8 millions ces dernières années. En outre ce label a établi en terme de précision une « nouvelle normalité » horlogère à laquelle se réfère notamment Baume & Mercier avec son mouvement Baumatic qu’ils soient Coscés ou pas. En termes de quantités certifiées, Rolex et Omega continuent à être les rois du COSC. Mais du fait que leurs montres répondent à des critères supérieurs à ceux retenus par cet organisme, ces marques entendent se démarquer des autres en associant la mention « chronomètre » à une appellation qui leur est spécifique : « Superlative Officialy Certified Chronometer » pour l’un, « Master Chronometer » pour l’autre.
Superlatif versus Master
Dès ses débuts, Rolex a joué un rôle de pionnier dans le développement de la précision des montres-bracelets. Au fil des années, les gains réalisés par la marque dans ce domaine se sont traduits par l’inscription portée sur les cadrans de ses montres. De « Chronomètre », elle passera à la fin des années 1930 à « Officialy Certified Chronometer » ; puis en 1959 à « Superlative Officialy Certified Chronometer ». A l’époque, l’ajout de ce qualificatif faisait écho au fait que les montres Rolex décrochaient régulièrement un bulletin de marche officiel portant la mention : « résultats particulièrement bons ». Fidèle à son profil résolument discret, la marque n’a pas modifié cette appellation en 2015 quand elle a renforcé de manière drastique les critères déjà exigeants de sa certification interne. Seul un cachet de garantie, passé du rouge au vert, signale l’entrée des montres Rolex dans une nouvelle dimension, grâce à des gains dans tous les domaines, et qu’elles conservent quand elles sont portées: étanchéité, résistance aux chocs et aux perturbations magnétiques renforcés; efficacité du remontage automatique amélioré ; allongement de la réserve de marche, et bien sûr haute précision avec un écart de marche réduit _2/+2 secondes par jour.
Pour des raisons assez identiques à celles de son grand concurrent, Omega a choisi la même année 2015 pour traduire les nouvelles performances de ses montres à travers des normes de qualité complémentaires à celles du COSC. Ainsi est née la certification Master Chronometer, validée par l’Institut Fédéral Suisse de Métrologie (METAS). Au cours d’un cycle de 10 jours, les montres terminées doivent réussir 8 sortes de tests. Le plus contraignant d’entre eux consiste en une exposition à de puissants champs magnétiques au sortir desquelles leur résistance au magnétisme est garantie jusqu’à 15 000 Gauss. Avec, par voie de conséquence, une précision portée à 0/+5 secondes par jour.
Autres labels de qualité
Chopard LUC Qualité Fleurier |
Cependant, rendons à César… ce qui est à Jaeger-LeCoultre. En introduisant en 1992 le « Contrôle 1000 heures » dans sa collection Master Control, cette manufacture a en effet beaucoup contribué à sensibiliser le public aux qualités intrinsèques que devraient présenter toute montre se voulant « de luxe ». Cette certification interne, désormais étendue à toute la production de la marque, comporte six semaines d’épreuves durant laquelle la montre est contrôlée dans les situations qu’elle pourrait rencontrer dans la vie quotidienne : variations de température, chocs, capacité de sa réserve de marche, étanchéité...rien n’est laissé au hasard pour que la pièce apporte toute satisfaction à son futur propriétaire.
Jaeger-Lecoultre Master Geographic, présentée en 2017 à l’occasion des 25 ans de la première collection de la marque soumise au « Contrôle 1000 heures » |
Maintenant, vous saurez « ce que parler veut dire » quand une marque évoquera son excellence horlogère…
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© Patrick Delaroche
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